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Jules Lermina
écrivain
né à Paris en 1839 et mort en 1915

 

Jules Lermina - Gravure  reproduite puis restaurée par © Norbert Pousseur

 

JULES LERMINA : Né à Paris en 1839.
Principaux ouvrages : « Maman Vireloque », « Histoires ventriloques », la « Magicienne ».

 

Autographe les Ames d'Amour.

Très douce, sans savoir même ce qu'est ta colère, serrant de ses deux mains son cœur brisé, elle s'en alla, n'osant pas regarder en arrière, dans la crainte de revoir ces yeux durs, ces yeux méchants que naguère elle avait connus si charmeurs.

Elle s'en alla, droit devant elle, suivant la ligne blanche de la route qui filait, filait si loin, mais non pas plus loin qu'elle ne voulait partir, puisque de tout son être là volonté était de disparaître, de s'enfoncer dans l'inconnu où il n'y a plus ni formes ni souvenirs.

Elle savait bien pourquoi on l'avait chassée: elle n'était que la pauvrette d'amour, riche de cœur et rien de plus: lui, brillant et seigneur, avait cueilli la fleur en passant, parce que la goutte de rosée lui avait donné l'illusion du diamant. Le diamant fondu sous le baiser, il avait jeté la fleur.

Elle s'en allait, et autour d'elle, dans l'air fin, dans l'éparpillement des rais de soleil, passaient, diluées et affinées, les cendres insaisissables des cœurs brûlés.

Et elle sentît que quelque chose en elle se dissociait, se résolvait en particules infinitésimales, comme en un de ces bombardements moléculaires dont parle la science, évaporation de son âme que l'amour ne retenait plus en cohésion.

Souffrance qui avait son exquisité, l'enallement du soi, petit à petit, pareil à l'éclatement des globules, quand dans l'eau fond un morceau de sucre.

Ainsi d'elle, de sa vie, de sa pensée, de son être, les imperceptibles fragments se subdivisaient, s'épandant et se perdant, buée lumineuse.

Sans le savoir, sans le vouloir, elle rentrait dans ce nirvana des Ames d'Amour, tandis que son enveloppe pâle tombait sur la route, vide et morte.

Les Ames d'Amour, sans individualité, sans formes, se fondaient en l'âme nouvelle qui se fondait en elles, et cela formait, au-dessus de la terre, les Limbes tristes où se réfugient et se réfugieront jusqu'à la fin des siècles les Ames d'Amour.




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Avril 1893 - Jules Lermina.

 

La page de présentation des "Annales politiques et littéraires" d'où est tiré cet article

 

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