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                      ... pour témoigner de leur passage sur la terre et de leur croyance en la puissance  invisible, ils ont laissé des pierres inexplicables, des cercles mystérieux,  des monuments tout bruts dont personne encore aujourd'hui n'a trouvé le sens  véritable; mystères des générations passées dont nous savons à peine le nom:  dolmen, cromlech, peulven, menhir.
                        
                        (Dolmen, ou dolmin, signifie. en breton  table de pierre; cromlech, lieu courbe, lieu voûté; peulven, pilier de pierre,  et menhir, pierre longue. Le dolmen est composé d'une pierre plate ou de forme  tabulaire, élevée sur plusieurs autres enfoncées en terre. On croit qu'il  servait d'autel sur lequel on sacrifiait les victimes. Le même nom s'applique  encore à une réunion de pierres larges, plates et hautes, disposées à côté les  unes des autres, de manière à former une enceinte carrée, fermée de trois côtés  et couverte de pierres plates; c'était une sorte de sanctuaire, dans, lequel le  pontife se plaçait pendant les cérémonies religieuses.
                        Le peulven ou menhir est un obélisque, ou  plutôt une pierre placée verticalement sur le soi.
                      Le cromlech est composé d'un nombre plus  ou moins considérable de peulven ou d'obélisques disposés en cercle,  quelquefois sur deux ou trois rangs, et dominés par un peulven plus élevé,  placé au centre. D'autres fois celte dernière pierre manque; alors le monument  druidique n'est plus qu'une enceinte sacrée, dont lentrée était interdite aux  profanes, et qui recevait le nom de malins.) 
                       
                      
                      
                      De ces monuments étranges d'un aspect si  nouveau, la Bretagne tout entière est remplie. Entre les baies de Brest et de  Douarnenez, des bords de la rivière d'Aûn (Aulne) jusqu'à la pointe de Toulinguet,  la presqu'île de Crozon attire l'attention et tous les regards de l'antiquaire. 
                        Cette presqu'île, célèbre dans l'histoire du druidisme, se divise en trois  fractions principales: la presqu'île de Quelern, l'île Longue, la pointe de la  Chèvre. Le paysan breton vous dira le nom de toutes ces anses battues par la  mer: Poulmic, le Fret, Roscanuel, Camaret, qui sert d'abri contre la tempête. 
                        Dans ce groupe d'îlots, d'anses, de presqu'îles, de curiosités naturelles, témoin  l'arche immense de Morgatte, les druides avaient transporté leurs mystères,  loin des regards profanes. Des plus curieux monuments de la religion des  Celtes, la péninsule de Crozon est remplie: autels, tombeaux, sanctuaires,  tombelles, pierres vacillantes, cimetières. Les anciennes traditions du Nord  racontaient que les alignements angulaires du Leuré étaient jadis le souvenir  des guerriers morts à cheval : Ordo cuneato equestrium designans sepulturas. 
                        La  presqu'île de Quelern, toute chargée de verdure, riches bosquets, jardins  fertiles, frais paysages, possède un menhir de quatorze pieds. Les paysans  disaient que le menhir renfermait un trésor, mais personne n'eût consenti à  porter sur cette antique pierre une main impie. Un soldat qui passait en Bretagne  fut plus hardi que les gens de Quelern; il se mit à la recherche du trésor,  mais la pierre croulante s'abattit sur le téméraire, qui resta enseveli sous  cette masse. 
                        — Vous retrouvez les mêmes pierres à la pointe de Toulinguet, sur  les
                        côtes de la Pallue, au nord du  Bec-de-la-Chèvre (Beg ar C'haor); la rivière de Labes est chargée sur ses deux  rives de ces dolmens; une de ces tombelles s'appelle la tombe d'Artus. Mais  quel Artus ? Le chef illustre, le digne chef de la Table-Ronde, l'homme qui a  donné le signal à tant de vaillants hommes, le véritable Artus, est enterré  non loin du château de Keruel, dans l'île d'Aval. Mais qui pourrait compter  tous les monuments du même genre dans la Cornouaille Armorique ?
                       
                      
                        Pierres druidiques de Meneck près de Karnac 
                      À la pointe du Raz, le point le plus  reculé du vieux monde, sur ce rocher miné, à cette hauteur de trois cents pieds  qui domine sept lieues de côtes, existe un menhir. 
                        Dans l'île de Sein  existait, il n'y a pas cinquante ans, un monument celtique renversé par les  Anglais; c'est l'île célèbre, la demeure des vierges sacrées. Les poètes ont  fait de cet inculte rocher le collège des druides. En langue celtique, sen veut  dire vieillard. 
                        Au village de Primelen, une source d'eau fraîche et limpide  sort en murmurant d'une vieille pierre druidique; la pierre, c'est l'autel; la  source cachée, c'est la divinité inconnue. Un long bassin, formé de longues  pierres, reçoit cette eau murmurante, dans laquelle le monument druidique  prolonge son ombre vénérée. 
                        Dans la baie d'Audierne, à la pointe du doch, non  loin de là petite crique de Poulhant, s'élève le plus imposant dolmen de tout  le                        Finistère. La plate-forme du monument est  portée sur seize pierres verticales; le monument n'a pas moins de  quarante-trois pieds de long sur six pieds et demi de large. — Lieu sauvage  tout rempli de silence et de mystère ! pas un troupeau et pas un pâtre; pas une  cabane dont l'ondoyante fumée vous promette l'accueil hospitalier et le repas  du soir. Les cris de l'oiseau de proie se mêlent aux grands bruits de la mer :
                      
                        Goélands ! Goélands ! 
                        Rendez-nous nos  maris! rendez-nous nos enfants!
                      
                        A la pointe de Penmarc'h, à travers les  débris d'une ville dont le nom même n'est pas resté, il serait difficile de  compter tous les monuments celtiques. Le menhir de la plaine est remarquable  par sa hauteur; masse informe et glorieuse, qui a demandé, pour être placée là,  la force de toute une armée. Le chef vainqueur, dort sous ce rocher élevé à sa gloire.  Un peu plus loin, près du bourg, deux menhirs de vingt pieds. Près du manoir de  Gouenac'h, une table de pierre; sur cette table ruisselait le sang des victimes  humaines; un de ces monuments s'appelle ty ar Gorriket, la maison du Nain; car  ces masses de pierre, à en croire le paysan breton, ont été portées là par les  nains et les mauvais génies. De même que dans tout le reste de la France on  croit aux géants, la Bretagne croit aux nains; le nain est le roi de ces  contrées; il a la malice des petits êtres : il est railleur, il est taquin, il  a les caprices et les colères d'un enfant à qui rien ne résiste.
                      
                      A Quimper, le premier évêché de la  Bretagne, les évêques de l'Eglise primitive ont fait une guerre assidue aux  souvenirs des vieilles idoles; seulement, les plus gros rochers sont restés  immobiles; apportés là par des mains inconnues, pas une force humaine ne les a  pu arracher de cette place. 
                        Non loin de Pontaven, l'antique forêt de Lusuen (du  mot celtique lusu, lousou, gui, fougère, verveine, plante salutaire ) prolonge  encore son ombre fatidique; c'est toute l'histoire du passé, cette forêt de  Lusuen; sa forteresse n'a pas été renversée tout à fait par le temps et par  les hommes. Le plus beau dolmen de Lusuen s'élève à quarante pieds; de chaque  côté de cette pierre solennelle a grandi un chêne séculaire; dans une fente du  milieu, dans cette pierre des vieux siècles, un autre chêne a poussé. 
                        Que de  siècles représentent ces pierres et ces arbres! combien de générations se sont  agenouillées à cet ombrage ! A Saint-Yvi, dans les genêts qu'agite incessamment  le vent du nord, se rencontre un dolmen incliné, le plus curieux de la contrée.  Sur les côtes de Kerlouan, tout au sommet de la stérile colline, vacille sur  son pivot, aussi agitée que les genêts de Saint-Yvi, une immense pierre vacillante  posée, pointe pour pointe sur le roc vif: miraculeux équilibre, pivot de  diamant qui ne s'est pas encore usé ! A Plouescat, entre la chapelle de  Brelevenez et le village de Cléder, la pierre des sacrifices contient un bassin  carré. — Mais qui pourrait compter tous les vestiges laissés par ses premiers  prêtres sur cette Bretagne croyante et sauvage? La plaine de Tregune, à elle  seule, suffirait à fatiguer toute une académie d'antiquaires. 
                        Dans tout le  cours de cette histoire, nous rencontrerons bien d'autres débris de la même  époque et de l'époque romaine, et les vestiges du moyen âge, et toutes les  ruines qu'entraînent après elles la guerre et l'émeute. Le monument druidique  est resté dans ces campagnes reculées, sinon un monument sacré, du moins un  objet de vénération et de respect. Sous ces larges toits de granit, aujourd'hui  chargés de mousse et de lichens, le paysan breton s'abrite contre l'orage, non  pas sans dire sa prière à la bonne Vierge, la patronne de tous les humbles  cœurs; priant ainsi, le Breton ne songe ni aux Celtes, ni aux druides, ni au  sang des victimes immolées; il a peur du mauvais génie habitant de ce lieu; il  évoque le couriquet ou le couril, caché dans ces ruines; il se le figure porté  sur deux ailes de chauve-souris; tête difforme, sourire malin, poussant de  petits cris d'ironie et de joie. Malheur à qui tombe dans la danse infernale de  ces malins génies ! Il faut aller encore, il faut aller toujours; il a beau  résister, le tourbillon l'emporte; les malins diables l'enlacent dans les  anneaux de leur queue traînante. Trop heureux encore de se tirer d'affaire, une  fourche à la main, en récitant ces paroles cabalistiques :
                      
                       Les hi, les han ! 
                        Baz ann arar a zo gant  han;
                        Les han, les hi ! 
                        Baz ann arar a zo gant  hi. 
                        
                        Laisse-la, laisse-le !
                        Le bâton du char le voilà; 
                        Laisse-le, laisse-la !
                        Le bâton du char le voilà.
                      
                      
                        Vous savez l'histoire du petit tailleur de  Coad-Bily. Il était si bossu, si trapu, si chevelu, si barbu, qu'il dit un  jour: «Pourquoi donc n'irais-je pas danser au clair de la lune avec les  couriquets, les cournils, les cournicanets?» Il dit, et il va. Justement la  lune était sombre, le vent bruyant, la bruyère agitée, les follets un peu  moins fous que d'habitude; la danse commençait à peine. On fait place au nouveau  venu; seulement on le trouve un peu laid pour un couriquet. Vous savez ce que  disaient les follets en dansant ? trois mots qui sont toute leur joie: dilunn,  lundi, dimeurs, mardi; dimerch'er, mercredi; lundi, mardi, mercredi, ainsi  disait le tailleur. La ronde était triste et monotone, la joie commençait à  peine; elle allait de dilunn à dimeurs. Enfin le petit bossu ajoute aux trois  journées des follets: jeudi et vendredi, dialiaou na digwener. A ce moment, la  danse devient un tourbillon, c'est la ronde infernale dans toute sa joie; on  reconnaît le petit bossu, on l'embrasse, on l'étouffé; il était parti avec une  bosse, il revient avec deux bosses: digne charge de couriquets ! 
                        — Beaux petits  contes populaires ! ils ont donné une vie nouvelle aux vieux monuments de la  race celtique, ils ont rajeuni ces vénérables pierres que le christianisme  avait ébranlées; ils ont rendu à ces quatre mille années couchées sous ces  dalles funèbres, un peu d'intérêt et de passion. Souvenir des races celtiques,  et tenant au plus antique honneur de la Bretagne, le monument druidique est  l'ornement de ces bruyères roses, de ces ravins, de ces rocs, de ces rivages;  il a conservé (à Locmariaker) quelques-unes des lettres de cette langue, plus  vieille de mille années, que la langue d'Homère. Race austère et dévouée, cette  race des vieux Bretons, française par le cœur, elle a toutes les vertus de la  France, elle a peu de ses défauts. Que de fois la Bretagne a sauvé la France!  Les premiers, les Bretons de Nomenoé ont résisté à l'invasion des hommes du  Nord ! Qui donc a chassé les Anglais de la France au quinzième siècle?  Dugesclin le Breton! Au quinzième siècle? le Breton Richemond ! Qui a battu les  Anglais sur toutes les mers? Duguay-Trouin, le Breton !
                       Dans le département du Morbihan, non moins  que dans le Finistère (Antiquités de la Bretagne, par M. le  baron de Fréminville.), les monuments des druides sont nombreux et d'un  intérêt puissant. Un vieux Celte sortirait aujourd'hui de son tombeau de  pierre, il reconnaîtrait la vieille patrie; aujourd'hui comme autrefois, la  bruyère entoure de sa fleur empourprée les têtes grisâtres des pierres placées  sur la tombe des héros; la fontaine sacrée murmure sa douce complainte sous le  feuillage du hêtre; l'autel du dieu Thor et d'Esus attend le sacrifice; du haut  du dolmen, le druide peut haranguer tout son peuple; debout au centre de ces  grands cercles taillés dans le roc, la prêtresse peut se livrer, le soir à  minuit, à                        ses incantations magiques. C'est vous que  j'atteste, pâles rochers de Kerhan (Kerhan, en breton, le champ de bataille.), dolmen de Locmariaker (lieu de la belle  Marie), Men ar Runn, pierres de la colline, qui dominez l'entrée du golfe du  Morbihan, nobles traces, fiers souvenirs, chantés par Ossian, le poëte des  Celtes : 
                      
                      «Place-moi, Fingal, sous quelque pierre mémorable qui   atteste la gloire de Calma.....  Cathula, dresse ma tombe sur la colline, et place sur ma tombe cette  pierre grise.... Ici repose, sous ce bloc, le chef de la race de Dermid. —  Ces pierres diront aux  siècles à venir: Ici se rencontrèrent Ossian et  Cathmor, et ils se dirent des paroles de paix ! — Pierres, vous parlerez aux  années qui  s'élèvent derrière les siècles! — Dans ces chants du barde, le  tombeau se retrouve toujours aussi souvent que paraît la gloire; mais à tant  de distance, qui donc pourrait dire à ces pierres: «Levez votre tête grisâtre,  et dites-nous les noms des héros que vous cachez ?»
                       
                      
                        Vue sur la plaine de Karnac
                       Cependant, si la pierre druidique n'a pas  gardé le nom du héros qu'elle recouvre, elle a gardé son nom à elle, et ce  nom-là sert à la désigner et à la faire reconnaître : Kerguelvan (pierre des  pleurs), Kerroch, lieu des rochers; ou bien le christianisme naissant s'est  emparé des pierres druidiques, tout comme il s'est emparé du Capitole romain. 
                        La croix et l'image de la Vierge protègent plus d'une pierre de                        la plaine de Karnac; Karnac, le cimetière  aux tombes éternelles! Les
                        Romains, jaloux de tout ce qui n'était pas  Rome, appelaient Karnac le camp de César. Mais le savant et vaillant homme à  qui était réservée une si belle mort, l'antiquaire le plus illustre du  Morbihan, le premier grenadier de France, Latour-d'Auvergne, dans ses Origines  gauloises, se demande avec juste raison si les Romains ont jamais retranché  leurs camps par un pareil entassement de rochers. Un autre antiquaire (M. de la Sauvagère.), pour  échapper aux Celtes sans tomber dans les Romains, affirme que les roches de  Karnac sont l'œuvre des Égyptiens, et la preuve, c'est que parmi les ruines de  Thèbes s'élève une ruine appelée Karnac ! 
                        J'aime tout autant les traditions des  habitants de la Cornouaille, qui appellent les pierres de Karnac les soldats de  saint Corneille ( saint Corneli, soudard). C'est tout un poëme de pierres ce  Karnac, lugubre poésie, silencieuse, solennelle, imposante. 
                      Suivez toujours la  trace druidique, elle vous conduira à Kennebon, à Cloukinec, landes désertes,  sombres forêts, aspect sauvage. La plaine d'Ardven est inculte comme aux  premiers jours; les pierres d'Ardven sont disposées dans un ordre régulier et  sur neuf files parallèles. Le dolmen de Kerkouno est le plus vaste du  Morbihan; les villages voisins en ont fait un lieu de réunion et de plaisir;  c'est le cabaret du village les jours de Pardons, depuis que le Pardon a cessé  d'être une fête toute religieuse. Une de ces pierres s'appelle la pierre du  diable, et même on raconte la chronique de la pierre du diable. C'est un  véritable peulven celtique, destiné à rappeler une histoire oubliée à jamais;  la légende seule est restée. Comme les manœuvres chrétiens élevaient la  cathédrale de Saint-Pol, le diable, pour écraser l'église naissante, prit cette  pierre et la jeta sur le clocher, qui déjà s'élevait dans les airs; mais la  pierre, lancée avec trop de violence, est retombée à cette place. Et en preuve,  le diable a laissé dans le roc la double empreinte de sa griffe de fer.
                      A une demi-lieue d'Auray, se rencontre le Manê Korriganet (la montagne des petits hommes), apportée là par les Korrics;  cette montagne, presque aussi abrupte qu'un monument celtique, est une des premières  forteresses de la Bretagne féodale. Mais, dans ce premier chapitre, nous  n'irons pas plus loin que les Celtes; nous retrouve-ions plus tard les  antiquités françaises, les vieux manoirs, les châteaux forts, les tours  féodales, les inscriptions, l'inscription de la tour d'Elven, par exemple : « Ci-gît Erec, fils d'Alain de Broerec,
                      dont Dieu ait l'âme. » C'est une belle  histoire à écrire et à entendre, cette histoire de Bretagne. Dieu vienne en  aide à notre esprit !
                      C'est ainsi que les vieilles pierres  druidiques, longtemps négligées comme les vains caprices d'un peuple enfant,  sont devenues autant de pages d'une histoire sérieuse, importante, et pour  ainsi dire authentique.
                      Rien qu'à voir ces monuments d'une  simplicité si grande, ces dalles grisâtres en guise d'autel, ces vieux chênes  qui devenaient tout un temple, on comprend quel grand peuple a passé dans ces  campagnes. Quant à deviner le dieu qu'ils ont adoré, de ce dieu-là les Celtes  n'ont pas laissé l'image; à peine s'ils ont laissé le nom: il s'appelait Teutatès. C'est le nom du dieu pacifique qui présidait à l'agriculture et aux  beaux-arts; le dieu de la guerre s'appelait Hésus, du mot celtique goez (Forêt qui fait es par contraction, ou du  mot euz terreur.)
                      Au reste, chaque dieu des Celtes avait son  nom, ses attributs, ses fantaisies. Le dieu qui présidait à la joie, qui avait  apporté la vigne dans les Gaules, le Bacchus gaulois, avait nom Kernunos, du  mot celtique korn; et l'on sait en effet que le Bacchus venu de Phénicie  portait des cornes. Le dieu d'où venait l'inspiration poétique avait aussi son  nom propre, et il tenait sa place à côté des deux autres. Quant aux divinités  secondaires, les génies inférieurs, les fées, le lutin familier, les farfadets,  tous les petits génies qui président à la poésie populaire, ils avaient noms Drac, Gripi, Fada. Ces peuples adoraient aussi l'eau et le feu, la terre et  les vents, et les montagnes. Chacune de ces divinités avait ses prêtres; parmi  les prêtres, les uns étudiaient les lois naturelles, les autres s'occupaient de  l'histoire vivante des temps passés; ils rappelaient dans leurs chants la mémoire  des héros, ils célébraient les vainqueurs de la bataille, ils chantaient  l'hymne funèbre; la jeunesse prêtait l'oreille à ces chants de guerre et  sentait s'allumer son courage aux récits des exploits de leurs pères. Après les  bardes, venaient les sacrificateurs, et au-dessus de tous ces prêtres, les  druides (Le nom de druide est derwidda en langue  kimrique, il dérive du mot par lequel les Gaulois désignaient le chêne,  c'est-à-dire derv en kimrique, deru en armorique, et duer en gaélique. Il est à  remarquer que Diodore de Sicile traduit druides par un mot grec qui signifie  hommes des chênes..)
                      
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