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Recueil curieux sur les costumes historiques français


Page de titre du recueil curieux sur les costumes historiques français - Reproduction © Norbert Pousseur

Recueil curieux de
Pièces originales rares ou inédites
en prose ou en vers
sur le costume et les révolutions de la mode en France
pour servir d'appendice aux
Costumes historiques de la France
par le Bibliophile Jacob (Paul Lacroix)

Cet ouvrage complète les pages consacrées aux
COSTUMES FRANÇAIS depuis CLOVIS JUSQU'À NOS JOURS

Soldat saxon du VIIe siècle - Costumes de France - reproduction © Norbert Pousseur Charles le Chauve en son costume, dessiné par Massard - reproduction © Norbert Pousseur Radegonde, reine de France - Costumes de France - reproduction © Norbert Pousseur


1ère partie : Lois somptaires

 

Ordonnance contre le luxe - 1294 (Philippe Le Bel).

Premièrement. Nulle bourgeoise n’aura de char.

Item. Nul bourgeois ni bourgeoise, ne portera vair, ni gris, ni hermines, et se délivreront de ceux qu'ils ont, de Pâques prochaines en un an. Ils ne porteront, ni pourront porter or, ni pierres précieuses, ni couronnes d’or, ni d’argent.

Item. Nul clerc, s'il n’est prélat, ou établis en personnage, ou en dignité, ne pourra porter vair, ni gris, et hermines, faits en leurs chaperons tant seulement.

Item. Le duc, le comte, le baron de six mille livres de terre, ou de plus, pourront faire quatre robes par an et non plus, et les femmes autant.

Item. Nul chevalier ne donnera à nul de ses compagnons, que deux paires de robes par an.

Item. Tous prélats auront tant seulement deux paires de robes par an.

Item. Tous chevaliers n’auront que deux paires de robes tant seulement, ni par don, ni par achat, ni par autre manière.

Item. Chevaliers, qui aura trois mille livres de terre, ou plus, ou les bannerets, pourra avoir trois paires de robes par an, et non plus, et sera l’une de ces trois robes pour été.
Nul prélat ne donnera à ses compagnons, qu'une paire de robe l’an, et deux chapes.
Nul écuyer n’aura que deux paires de robes, par don ni par achat, ni en nulle autre manière.
Garçons n’auront qu’une paire de robe l’an.
Nulle damoiselle, si elle n’est châtelaine, ou dame de deux mille livres de terre, n’aura qu’une paire de robe par an.
Nul bourgeois, ni bourgeoise, ni écuyer, ni clerc, s'il n’est en prélation, ou en personnage, ou en geigneur état, n’aura torche de cire
.

Nul ne donnera au grand manger, que deux mets, et un potage au lard, sans fraude. Et, au petit manger, un met et un entremet. Et, s'il fait le jeûne il pourra donner deux potages aux harengs, et deux mets, ou trois mets, et un potage. Et ne mettra en une écuelle, qu'une manière de chair, une pièce tant seulement, ou une manière de poisson, ni ne fera autre fraude. Et sera comptée toute grosse chair pour met, et n’entendons pas que fromage soit met, s'il n’est en pâte, ou cuit en sauce.

Il est ordonné, pour déclarer ce que dessus est dit des robes, que nul prélat, ou baron tant soient grands, en puisse avoir robe, pour son corps, de plus de vingt et cinq sols tournois l’aune de Paris.
Les femmes de barons à ce feux.

Le comte et le baron ne pourront donner robes à leurs compagnons, de plus de dix-huit sols l’aune de Paris.
Le banneret et le châtelain ne pourront avoir robes, pour leur corps, de plus de dix-huit sols tournois l’aune de Paris, et leurs femmes à ce feux. Et pour leurs compagnons, de quinze sols l’aune de Paris.
Les écuyers, fils de barons, banneret et châtelain ne pourront avoir robes de plus grand prix de quinze sols tournois de Paris.
Prélats, comtes, barons, bannerets et châtelain ne donneront robes à leurs écuyers, de plus de sept sols ou de six sols l’aune de Paris.
Les autres écuyers qui ne sont de ménage, et se vêtent de leur propre, ne pourront faire robe de plus de dix sols tournois l'aune.

Clercs qui sont en dignités, ou en personnages, ne pourront faire robes, pour leurs corps, de plus de seize sols tournois l'aune de Paris, et, pour les compagnons, de douze sols tournois l'aune.
Clercs qui ne sont en dignités, ni personnages, fils de comtes, barons, bannerets ou châtelains, ne pourront faire robe de leur corps, de plus de seize sols l'aune, et, pour leurs compagnons ou pour leurs maîtres, de dix ou douze sols tournois tout au plus l'aune.
Les autres clercs, qui font robe du leur, ne pourront faire robe pour leur corps, de plus de douze sols six deniers l'aune, Et, s’il est chanoine d’église cathédrale, il pourra faire robe de quinze sols tournois l’aune, et non plus.

Bourgeois qui auront la valeur de deux mille livres tournois, et au-dessus, ne pourront faire robe de plus de douze sols six deniers tournois l’aune de Paris.
Et leurs femmes, de seize sols au plus.
Les bourgeois de moins de valeur ne pourront faire de robe de plus de dix sols tournois l'aune, et pour leurs femmes, de douze sols au plus.

Et sont ces ordonnances commandées à garder, aux ducs, aux comtes, aux barons, aux prélats, aux clercs, et à toutes manières de gens du royaume, qui sont en la foi, sur celle foi qu’ils sont tenus. En telle manière que les ducs, les comtes, les bers, les prélats, qui fera contre cette ordonnance, paiera cent livres tournois pour peine. Et sont tenus à, faire garder cet établissement à leurs sujets, en quelque état qu’ils soient, et en telle manière que, si aucun banneret fait encontre, il payera cinquante livres tournois, et le chevalier ou vavasseur, vingt-cinq livres tournois, et les doyens, et les archidiacres, les prieurs, et les autres clercs qui ont dignité, ou personnage, soient de siècle, soient de religion, quiconque sera encontre, il paiera cent sols, aussi comme l’autre ; et les amendes de toute manière de gens lais, qui pour cette achoison de cet établissement seront levées, seront aux seigneurs, en qui terre, ou en qui seigneurie les forfaits seront fait, soient le seigneur clerc, ou lais, et les amendes des clercs, en quelque état qu'ils soient, seront à leurs prélats, ou à leur souverain. Et en telle manière, que celui, par qui le forfait vendra à la connaissance  du seigneur, aura le tiers de l’amende. Et s'il advenait qu’aucun clercs ou lais, de quelque condition qu'il fût, accusé qu'il eût fait contre cette ordonnance, et il s’en voulait purger par son serment, en la manière que chacun a accoutumé à jurer, ils en seront crus, et seront quittes de la peine. Et se purgera chacun, soit clercs ou lais, qui de cette chose se voudra purger. Ce fut fait et ordonné à Paris l’an de grâce 1294.

Sic reperitur in quodam parvo libro Cameræ Compotorum pro tranquillo statu regni.

 

Commentaire du transcripteur :

On a donc ici des lois contre le luxe - Il ne s'agit pas de limiter la fortune des gens, mais bien que leur train de vie public soit limité. Il doit s'agir à la fois d'un besoin de ne pas irriter le peuple par de trop tapageuses richesses, mais sans doute aussi que les différents corps constitués ne fassent pas ombrage aux personnages de la Cour et au Roi.


1664 - 1677 (LOUIS XIV).
Ordonnances contre le luxe et la superfluité des habits.


LOUIS, par la grâce de Dieu, Roy de France et de Navarre, à tous ceux qui ces présentes lettres verront, Salut.
Comme il n’y a point de cause plus certaine de la ruine d’un État, que l’excès d’un luxe déréglé, qui, par la subversion des familles particulières, attire nécessairement celle du public : aussi, ne voulons-nous rien omettre de tout ce qui peut témoigner le désir que Nous avons de prévenir ce mal, et d’en préserver notre royaume par de bonnes et sévères lois. En quoi Nous nous sommes d’autant plus confirmé, que ce serait en vain que nous travaillerions à soutenir par les armes la gloire et la grandeur de cet État, si cependant nous souffrions qu’il fut affaibli par le dérèglement de ceux qui ne gardent aucune mesure en leurs vaines et excessives dépenses. Outre que c’est chose digne de notre soin de ne permettre point qu’au milieu des nécessités publiques, et pendant que la plupart de nos sujets sont incommodés par les impôts et les subsides extraordinaires, les autres fassent montre de leurs richesses, et les emploient avec profusion en des superfluités et des vanités inutiles ; au lieu qu’ils les pourraient plus utilement faire servir au public et les réserver pour le secours de leur patrie.
Pour arrêter donc le cours de ce désordre, et apporter des remèdes à ce mal, avant qu’il se soit fortifié par la licence et par le temps, Nous avons considéré que les dépenses où le public est plus intéressé, se font aux habits, où l’on emploie les étoffes et les passements d’or et d’argent, et aux ouvrages de fil qui viennent des pays étrangers ; de sorte qu’outre le transport de nos monnaies employées à l'achat de telles étoffes, il se consume encore dans notre royaume une grande quantité d’or et d’argent que l’on convertit en de semblables ouvrages, dont il n’en revient au public aucune utilité, mais, au contraire, un très notable préjudice, qui est encore augmenté par l’abus de quelques marchands, qui fondent les monnaies pour les faire entrer dans les manufactures. C’est pourquoi, avant que le mal soit plus fort que les remèdes, et pour conserver les richesses dans notre royaume, en empêchant la dissipation des biens de nos sujets, Nous ne désirons pas seulement de renouveler les édits qui ont été ci-devant faits contre le luxe, mais encore par la rigueur que nous y apportons, Nous en voulons procurer l’exacte observation. A ces causes, savoir faisons, qu’après avoir mis cette affaire en délibération en notre Conseil ; de l’avis de la Reine régente notre très honorée dame et mère, et de notre certaine science, pleine puissance et autorité royale, Nous avons statué et ordonné, statuons et ordonnons, par ces présentes, ce qui ensuit :

Premièrement. — Faisons très expresses inhibitions et défenses à tous nos sujets, de quelque qualité et condition qu’ils soient, de porter des habits ou ornements, comme cordons, baudriers, ceintures, porte-épées, aiguillettes, écharpes, jarretières, nœuds, rubans, tissus, ou tels autres ornements qui puissent être, aucunes étoffes d’or et d’argent, ou barrées, ou mêlées d’or ou d’argent fin ou faux, à peine de confiscation des dites étoffes, habits et ornements, et de quinze cent livres d’amende, applicable le tiers à l’hôpital des lieux, l’autre tiers aux filles de la Madeleine établies à Paris, et l’autre tiers aux officiers qui auront fait les captures.

II — Comme pareillement défendons de mettre, sur les dits habits ou autres ornements, aucunes piqûres, emboutissements, chamarrures de passements, boutons, houppes, chaînettes, porfilures, canetilles, paillettes, nœuds de soie ou d’or ou d’argent, fin ou faux, trait ou filé, ou de gez, ou autre chose semblable, qui pourront être cousues et appliquées en forme de broderie, et dont les habits et autres ornements puissent être couverts et enrichis.

III — Défendons aussi de faire appliquer, sur les dits habits ou autres ornements, aucunes pierreries, perles, boutons d’or ou d’argent simple ou doré, cuivre ou laiton doré ou émaillé, et telle autre façon d’orfèvrerie, telle qu’elle puisse être.

IV — Voulons que les plus riches et somptueux habillements soient de velours, satin, taffetas et autres étoffes de soie, sans autre enrichissement que deux passements ou dentelle de soie, de deux doigts au plus, ou d’une bande de broderie, de largeur d’un pouce : lesquelles dentelles ou bandes de broderie seront appliquées sur les étoffes des habits, sans aucune étoile entre deux ; savoir : sur les habits des hommes, deux à l’entour de leur collet et au bas de leurs manteaux, et sur le long et canons de leurs chausses, ouvertures des manches, haut des manches, au milieu du dos et le long des boutons et boutonnières, et aux extrémités des basques des pourpoints ou jupes.

V — Et quant aux habits des femmes, filles et enfants portants robes, les dits passements ou broderie, d’un pouce de largeur, y seront appliqués, sans pouvoir mettre aucune étoffe entre deux, ainsi que dessus ; savoir : deux passements  et dentelles, de la susdite largeur, à l’entour du bas et au-devant des robes et jupes, sur le milieu des manches, autour des basques et corps des robes et jupes.

VI — Défendons, en outre, à tous nos sujets, de quelque qualité et condition qu’ils soient, de faire porter à leurs pages, laquais et cochers, aucuns habits de soie, ou bandes de velours, satin ou autre étoffe de soie : voulons qu’ils soient vêtus d’étoffe de laine, avec deux gallons sur les coutures et extrémités des habits seulement.

VII — Faisons pareillement très expresses inhibitions et défenses, à tous marchands, de trafiquer de pays étrangers d’aucunes étoffes, passements d’or ni d’argent, vrai ou faux, ni de faire ou faire faire les dites étoffes, passements, franges d’or ni d’argent vrai ou faux en notre royaume, à peine de confiscation des dits ouvrages, trois mille livres d’amende applicable comme dessus, et d’être déclarez indignes d’exercer ci-après la marchandise, ni autres charges.

VIII — Défendons à tous tailleurs, brodeurs, carrossiers, selliers, de faire aucuns ouvrages de leur métier, où il y ait aucune broderie, passements, frange d’or ni d’argent, et généralement aucun or ni argent, vrai ou faux, à peine de confiscation des dits ouvrages, quinze cens livres d’amende, et d’être privés ci-après de l’exercice de leur métier ; les dites amendes et marchandises confisquées et applicables comme dessus.

IX — Désirant pareillement empêcher les dépenses excessives qui se font en passements, dentelles et autres ouvrages de fil qui viennent des pais étrangers; Nous faisons très expresses inhibitions et défenses à tous nos sujets, de quelque qualité et condition qu’ils soient, de porter huit jours après la publication de la présente Déclaration, en leurs linges, collets, manchettes, bas à botter, et généralement en tous autres linges, aucuns passements, dentelles, entretoiles, points de Gennes, pontignacs, points-coupés, ou autres ouvrages de fil quelconques faits de pays étrangers : à peine, contre les contrevenants, de confiscation des ouvrages qu’ils porteront, et de quinze cens livres d’amende, applicable comme dessus

X — Et d’autant que les marchands lingers sont la principale cause du luxe et des dépenses excessives qui se sont faites par nos sujets, Nous leurs faisons très expresses inhibitions et défenses, et à tous nos autres sujets, de quelque qualité et condition qu’ils soient, d’acheter ni faire trafic d’aucuns ouvrages de fil faits hors notre royaume, et à, tous ouvriers en linge, d’en employer en leurs ouvrages.

XI — Et, en cas de contravention à nos dites défenses par les dits marchands, voulons que toute la marchandise dont ils se trouveront avoir trafiqué hors de notre royaume, soit brûlée, et les dits marchands condamnés en six mille livres d’amende, applicable comme dessus, et privés pour jamais de faire aucun exercice de marchandise, ni d’aucune autre charge.

XII — Et afin que les dits marchands ne prennent occasion de continuer le dit trafic, supposant que ce sont marchandises qu’ils avaient avant notre présent édit; voulons et ordonnons que, quinzaine après la publication d’icelui, ils se transportent de greffes des juridictions ordinaires des lieux où ils seront demeurant et domiciliés pour là affirmer et déclarer la quantité qu’ils ont par devers eux des dites marchandises étrangères, dont ils laisseront un inventaire signé d’eux; sur lequel inventaire enjoignons aux dits juges ordinaires de faire la visite des dites marchandises, en présence des maitres et gardes de la marchandise, sans que pour ce ils puissent prendre ni exiger aucun salaire.

XIII — Enjoignons pareillement aux maîtres et gardes des dites marchandises, de veiller et tenir la main à ce qu’il ne s’achète et débite aucunes des marchandises et ouvrages défendus, dans les boutiques des marchands, et faire incontinent le rapport à la police des contraventions qui seront faites, à peine d’être privés, pour leur négligence, de pouvoir jamais exercer la marchandise.

XIV — Voulons et entendons que les sentences et jugements des confiscations et amendes, qui seront rendus à l’encontre des contrevenants à nos présentes défenses, soient exécutés nonobstant oppositions ou appellations quelconques, et sans préjudice d’icelles. Si donnons en mandement à nos aimés et féaux conseillers, les gens tenants nos cours de Parlement, baillis, sénéchaux, juges ou leurs lieutenants, et à tous nos autres justiciers et officiers qu’il appartiendra, que ces présentes ils fassent lire, publier, enregistrer, exécuter, garder et observer inviolablement, selon leur forme et teneur. Enjoignons à nos procureurs généraux, leurs substituts, y tenir la main, et faire toutes les diligences requises et nécessaires pour ladite exécution ; car tel est notre plaisir. En témoin de quoi, Nous avons fait mettre notre sceau à ces dites présentes.

Donné à Paris, le dernier jour de mai, l’an de grâce mil six cent quarante-quatre, et de notre règne le deuxième. Signé, LOUIS; et plus bas, par le Roy, la Reine régente sa mère, présente, de Guenegaud ; et scellées, sur double queue, du grand sceau de cire jaune.

 

 


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