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Canne

Terme du Petit dictionnaire de l'habillement

 

Antoine de Vergi tenant une canne - gravure restaurée par © Norbert Pousseur

Canne : Il y a longtemps que les cannes ornées et décorées sont en usage  en France, même pour les dames, puisqu’on voit que dans le onzième siècle elles en portaient dont le haut était tourné en tête d’oiseau ou d’animal.
Pendant longtemps cet usage a été négligé et a repris faveur ensuite. On a vu dans le dernier siècle des hommes affublés d’un manchon et d’une épée, le chapeau sous le bras ; puis une canne, une bourse ou un crapaud, et toujours le claque ou le chapeau à trois cornes sous le bras.
À cette époque, les grand-mamans seules portaient des cannes pour se soutenir. Les hommes, qui en ont usé quand ils étaient vieux ou lorsqu’ils avaient de la peine à marcher, en ont fait un ornement.
Tous les médecins et quelques chirurgiens avaient des cannes d’une forme à faire reconnaître leur profession. On a vu des cannes à pomme d’or, d’acier, d’ivoire, à béquille et à bec de corbin d’or, dont quelques-unes étaient riches et d’un travail précieux. Le grand Colbert, ministre sous Louis XIV, en portait une de cette espèce, et avait transmis l’usage d’en porter de semblables à ses Successeurs. Les hommes, les jeunes gens de nos jours, les enfants portent des cannes, des badines, des bambous ; les uns pour se sou­tenir, les autres par mode ; ceux-ci pour jouer avec, ceux-là pour faire comme les autres. Les dames de la cour de Louis XIV, de Louis XV, de Louis XVI, portaient des cannes pour les aider à se soutenir ; le poids de leur vêtement, de leur coiffure était si lourd, et leurs talons si hauts !

Il est quelques cannes dont le souvenir est venu jusqu’à nous
Constance, fille de Guillaume Ier, seconde femme de Robert, roi de France, creva, disent les chroniques du temps, les yeux d’Etienne son confesseur, avec la pomme de sa canne qui était surmontée d’un bec d’oiseau. Louis VII portait presque toujours une petite baguette à la main. En 849, Charles-le-Chauve, roi de France, et Louis de Bavière, son frère, se lièrent ensemble d’une amitié si étroite, « que se donnèrent mutuellement des bâtons l’un l’autre, et recommandèrent leurs femmes et leurs enfants au survivant. » Le bâton, dont le souvenir remonte jusqu’aux premiers temps, est sans contredit celui que Juda donna à sa bru Thamar pour obtenir ses faveurs.
« Thamar, dit la Genèse, était veuve et sans enfants. Or, Juda étant  allé voir tondre les brebis, Thamar prit un voile et s’assit sur un chemin fourchu, et Juda l’ayant aperçue, crut que c’était une fille de joie, car elle avait caché son visage, et s’étant approché d’elle,  il lui dit: il faut que je couche avec toi ; car il ne savait pas que c’était sa bru. Elle lui dit: que me donneras-tu pour coucher avec moi ? Je t’enverrai, dit-il, un chevreau de mon troupeau. Elle répliqua : je ferai ce que tu voudras, mais donne-moi des gages ?  Que demandes-tu pour gages ? dit Juda. Thamar répliqua: donne-moi ton anneau, ton bracelet et ton bâton. Le marche fut conclu, et Thamar devint mère. »

Longtemps les cannes de jonc furent en grand crédit ; c’était à qui aurait le jet d’une plus grande longueur. On en a vu, dans le cabinet du dernier prince de Condé, qui portaient trente-huit pouces du premier au second jet.
La canne dont se servait ordinairement l’auteur de la Henriade, quoique très simple, fut vendue 1,600 francs. Le docteur Corvisart en devint possesseur.
Le prince royal de Prusse, depuis le grand Frédéric, envoya à Voltaire une canne ornée du buste en or de Socrate.

En 1778, une rixe s’étant élevée entre des chasseurs, des heiduques (valets) à livrées, qui portaient des sabres et des épaulettes, et les officiers et sous-officiers, sur le quai de la Ferraille, à Paris, les militaires ayant donné des coups de canne aux laquais, M. le lieutenant de police, à la demande des maîtres des battus, défendit aux recruteurs de porter des cannes. Deux jours après, on les vit tous se promener sur les quais, avec des éventails de la hauteur d’une canne, qu’ils tenaient par les lames en haut et dont le bout d’en bas était plombé.

On lit dans les Mémoires de Mlle de Montpensier : « La charge du  grand-maître de l’artillerie étant vacante en 1669, par la démission du duc de Mazarin, le roi la promit à Lauzun, en lui recommandant le secret. Lauzun eut la vanité d’en parler. M. de Louvois le sut, et il supplia le monarque de ne point confier cette charge à un homme dont il ne pouvait supporter les menaces capricieuses et hautaines. Louis XIV paraissait irrésolu ; Lauzun pressa, il osa le sommer de tenir sa parole ; il eut même la témérité de briser son épée sous les yeux de ce prince, en disant qu’il ne servirait jamais un roi qui manquait à sa parole. Louis XIV indigné, craignant de ne pouvoir se contenir, jeta sa canne par la fenêtre, en s’écriant qu’il aurait trop de regret s’il frappait un gentilhomme. »

Le roi de Prusse, père du grand Frédéric, grand amateur de la discipline militaire, passant en revue un de ses régiments, fut si mécontent de la manœuvre, qu’au lieu d’imiter le noble usage que Louis XIV avait fait de sa canne, il s’oublia jusqu’à frapper de la sienne le major qui commandait. L’officier outragé recule deux pas, porte la main à l’un de ses pistolets, le tire aux pieds du cheval du roi, et de l’autre se casse la tête. « Ce trait, auquel je ne pense jamais sans tressaillir d’admiration, dit J.-J. Rousseau, me revint » fortement en écrivant l’Émile, et j’en fis l’application de moi même, au cas d’un particulier qui en déshonore un autre. » Mais en modifiant l’acte par la différence des personnages, on sent qu’autant le major bâtonné est grand et sublime quand, prêt à s’ôter la vie, maître par conséquent de celle de l’offenseur et le lui prouvant, il la respecte pourtant en sujet vertueux, s’élève par cela même au-dessus de son souverain, et meurt en lui faisant grâce, autant la même clémence vis-à-vis un brutal obscur serait inepte : le major employant son premier coup de pistolet n’eut été qu’un forcené, le particulier perdant le sien ne serait qu’un sot.

Les exempts des gardes du corps, les chambellans, quelques officiers supérieurs portent des petits bâtons d’ébène ; les fourriers dans la cavalerie, les adjudants-majors et les adjudants-sous-officiers dans l’infanterie, ont des cannes...
En habit d’amazone, les dames portent à la main une petite badine.
Sous le règne de la terreur, les hommes portaient de grosses cannes qu’ils appelaient juges de paix. Les patriotes de ce temps qui accompagnaient leur patron Robespierre étaient ainsi armés, et lui formaient une compagnie de gardes du corps.

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Canne, substantif féminin. Bâton qu’on porte à la main, fait de ces sortes de bois. Il sert ou à se soutenir en marchant, et quelquefois pour marquer le commandement. On les enrichit par les bouts, d’argent, d’ivoire, d’agate, de cristal, etc.
Ce vieillard est réduit à porter la canne.
Cet Officier a donné cent coups de canne à un soldat insolent.

(Dic. Furetière, 1690)

Vers Antoine de Vergy avec sa canne Canne portée par Antoine de Vergi

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Le terme ci-dessus est l'un de ceux utilisé pour décrire, le cas échéant, le costume du personnage en illustration, provenant de l'ouvrage :
'Costumes français depuis Clovis jusqu'à nos jours', publié par A. Mifliez en 1855.


 

 

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