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Page de garde de l'Abrégé de la vie des plus fameux peintres - Gravure  reproduite puis restaurée par © Norbert Pousseur

Jean Joseph del Sole
peintre lombard

né en 1654 et mort en 1719

Joseph del Sole, peintre italien - Gravure  reproduite puis restaurée par © Norbert Pousseur

 

 

Gravure et texte extrait de l'ouvrage 'Abrégé de la vie des plus fameux peintres' d'Antoine Joseph Dezallier d'Argenville, édition de 1762, collection personnelle.


La ville de Bologne si fertile en grands hommes,  en vit augmenter le nombre, en 1654, par la naissance de Jean-Joseph del Sole. Son père, Antoine-Marie, fut disciple de l’Albane, et assez bon peintre de paysages. Son fils qui apprenait le Latin, le voyant sans cesse appliqué à son art, en prit le goût et abandonna ses études. Dès que le Cignani et le Canutti, qui étaient amis de son père, eurent vu ses dessins, ils prévirent en lui la supériorité d’un génie grand et élevé. Lorenzo Pasinelli fut choisi pour lui frayer la route des artistes distingués : les peintures des Carraches, dans le palais Fava, furent longtemps l’objet de ses études, et aucun élève du Pasinelli ne le pouvait atteindre. Cette réputation naissante lui procura deux tableaux pour le chœur des Carmes déchaussés, l’un une flagellation, l’autre un couronnement d’épines ; on en parut si content, qu’il lui en fut ordonné deux autres pour Rome, la mort de saint Joseph, et un saint Philippe de Néri. Ces quatre morceaux firent connaître l’étendue de son génie, et le trait suivant la bonté de son cœur.

La longue maladie d’un père demandait un secours proportionné à son état ; Joseph qui le vit à l’extrémité, lui apporta une somme considérable dont le père ne voulut point disposer, lui recommandant seulement sa mère, deux frères et quatre sœurs, à qui il ne laissait rien. Après la mort de son père, il eut soin de cette nombreuse famille, de s’en regarda comme le chef.

Pasinelli qui avait toujours souhaité que quelqu’un de ses disciples gravât ses principaux tableaux, crut Joseph del Sole très propre à cette entreprise ; en effet, il grava le beau plafond que son maître avait peint pour le Général Montecuculli, et qui représentait Mars recevant un bouclier des mains de Jupiter de de Junon ; et il grava pareillement un de ses dessins, fait pour une Thèse, que devait soutenir un des Barbarigo, et où l'on voit saint François Xavier qui convertit un grand nombre d’Infidèles dans le Japon. Joseph se remit ensuite à la peinture, et prit le dessin de former une école : ce fut alors que les ouvrages de conséquence se présentèrent à lui, et que l’académie de Bologne le reçut dans son corps. On lui donna à peindre le corridor qui conduit au maître-autel de san Biagio, de la voûte du même lieu, où il représenta la Charité de la Foi, accompagnées chacune de trois enfants. Ce morceau très applaudi lui attira des disciples, et le fit choisir pour peindre la voûte d’une salle, à Parme, où il fit paraître toute la famille du Marquis Grande Maria, dont l'Aldrovandini peignit l’architecture.

La salle du Marquis Mansi l’occupa à Lucques, pendant deux années ; il peignit dans le milieu le banquet des Dieux ; dans une des extrémités, le Jugement de Paris ; et dans l’autre, l’incendie de la ville de Troie. Il revint ensuite à Bologne, cueillir de nouveaux lauriers dans la principale  chapelle de la confrérie des Pauvres, où au milieu de la tribune il a représenté Dieu le Père et le Fils, qui invitent la Vierge à monter dans le Ciel ; ce qui s’accorde bien avec le tableau d'autel,  peint sur le dessin de Louis Carrache, qui l'a fait  voir s’élevant dans la région céleste ; Abraham, Aaron, David et Salomon, se voient dans les angles. Cette chapelle convainquit tout le monde de sa capacité : le cardinal Légat vint la visiter ; il complimenta fort notre artiste, et lui accorda même la grâce d’un criminel parent du Gardien, de cette Église.

Ce grand travail qui avait beaucoup fatigué son imagination, altéra sa santé ; il tomba malade, et pensa mourir. C’eût été une grande perte pour les arts, que celle de tous les beaux ouvrages qu’il a faits dans la suite. Sitôt qu’il fut rétabli, il peignit un Priam, tué par Pyrrhus, dans le Temple de Minerve, pour le Marquis Durazzo de Gênes, et plusieurs morceaux pour le Prince Eugène de Savoie et le Prince de Lichtenstein ; savoir, Diane avec Endimion ; la même Déesse au bain ; une Didon ; le sacrifice de Jephté ; et un saint Jérôme.

Il partit peu de temps après, pour exécuter à Vérone, quelques tableaux de chevalet, que souhaitait le Comte Ercole Giusti. Les peintres du pays croyant que Joseph del Sole était longtemps à terminer ses ouvrages, le taxèrent de lenteur ; la chose lui revint, et il résolut de leur montrer qu’il allait vite quand il voulait. Le Comte convint avec lui qu’il amènerait ces peintres dans son atelier : alors il commença devant eux une Ariane avec Bacchus, assez grand tableau, qui fut fait en huit jours, et qui leur plut extrêmement ; ensuite, devant les mêmes peintres, il effaça presque tout ce qu'il avait fait, et  travailla le tableau à sa  manière ordinaire. Sur ce qu’on lui demanda la raison de ces changements : J'ai fait, dit-il, ce tableau bien vite, pour faire voir que, si en travaillant ainsi j'ai pu satisfaire les autres, je ne me suis pas satisfait moi-même. Il ajouta, qu'un peintre était blâmable de se contenter de quelques éloges, tandis que par une étude assidue, il pouvait en mériter de plus grands. Extrêmement jaloux de sa réputation, il suivait ce que dit du Fresnoy :
... Ne sperne, superbus,
Discere que de te fuerit sententia vulgi.

De retour à Bologne, il entreprit plusieurs ouvrages, entr’autres san Cassano et san Crisologo, protecteurs d'Imola, pour la Compagnie del Suffragio de cette ville ; un trait de la vie de Sainte Thérèse, pour l'Électeur Palatin ; et une Madeleine avec un ange qui lui montre une couronne d’épines, pour des religieuses de Modène.
Toutes ces commissions, tant de travaux commencés, une famille nombreuse dont il fallait prendre soin, l'avaient toujours empêché d’aller à Rome, quoiqu’il en eût un désir extrême. Après la mort de sa femme, en 1710, et le mariage de ses quatre sœurs, il exécuta ce projet avec un Romain, établi à Bologne, ils passèrent à Florence, où la grande Princesse Violante fit beaucoup d’accueil à Joseph, et lui confia un jeune homme quelle protégeait. Il logea à Rome, chez son ami,  et ne fut occupé que des belles choses qui ornent cette ville. Chacun voulait avoir de les ouvrages ; il ne fit cependant que le portrait de la nièce de son hôte. Le Pape, à qui il fit sa cour, lui montra le cas qu’il faisait d’une Sainte Catherine placée près de son lit, et le cardinal Casani lui envoya souvent ses carrosses. Quelques mois après, Joseph s’en retourna à Bologne avec son ami, et travailla aussitôt pour l’Électeur Palatin, qui lui demandait un grand tableau représentant l’enlèvement des Sabines.

Son esprit animé par les belles peintures et les antiques de Rome, parut s’élever au-dessus de tout ce qu’il avait fait ; ce fut particulièrement dans une annonciation pour le maître-autel des Religieuses déchaussées de Bologne. Ce tableau était resté ébauché, par la mort de son maître Pasinelli, on l’avait chargé de le finir ; mais il ne suivit pas la pensée de Pasinelli. Le même ami qui l’avait mené à Rome, ayant affaire à Venise, l'engagea d’y aller avec lui ; et par ce moyen, il en revit toutes les peintures ; mais une grosse fluxion dans la tête, qui lui entreprit la langue, l’obligea de revenir promptement à Bologne.
Dans les intervalles que lui laissait son mal, il peignit quelques tableaux de chevalet, et un Saint Stanislas aux pieds de la Vierge, pour le maître-autel des Jésuites de Plaisance : ce fut son dernier ouvrage qu’il laissa même imparfait, et où les Jésuites n’ont jamais voulu permettre qu’une main étrangère travaillât. Son mal augmentant, on lui conseilla de prendre l’air, et le Sénateur Magnani lui prêta sa maison de plaisance : il y fut accompagné de ses parents et  de ses élèves, qui le virent mourir, en 1719, à l’âge de soixante-cinq ans ; il ne laissa point d’enfants, et ses deux frères, Pierre-François et Jérôme, ses principaux héritiers, lui firent faire une pompe funèbre, ornée de pyramides et d’urnes sépulcrales ; 0n y exposa son portrait, et Saint Stanislas qui était son dernier ouvrage.

Ce fameux artiste avait formé un recueil de dessins des grands maîtres, qui faisait ses délices, et dont il n’avait jamais voulu se défaire ; ce recueil lui attirait la visite de tous les étrangers, et ses manières civiles soutenues d’une  conversation agréable, lui avaient acquis des amis : ses reparties étaient autant de sentences qui auraient mérité d’être publiées. Quoique grand peintre d’histoire, il a fait beaucoup de portraits, parmi lesquels on remarque celui d’une Dame de la famille Marsilli, habillée en Judith, et le sien placé dans la galerie du Grand-Duc. Tous les Potentats l’estimaient et le recherchaient. Le Roi de Pologne fit tout ce qu’il put, pour l’attirer à son service ; mais il ne voulut jamais abandonner sa mère et sa famille : il refusa pareillement les offres avantageuses de la cour d’Angleterre. Le temps considérable que Joseph employait à terminer ses tableaux, venait de l’excellence de son goût, qui cherchait, pour ainsi dire, toujours querelle à l’ouvrage, et lui faisait naître sans cesse, des doutes et des difficultés. Vouloir exceller, éviter le médiocre, est un point où arrivent rarement ceux qui vont si vite ; ils laissent toujours quelque chose derrière eux.

Joseph del Sole fut quelque temps imitateur de son  maître Pasinelli, qu’il surpassa dans l'ordonnance   et la convenance des sujets. Ses figures auxquelles il n’avait pu donner la voix,  imitaient les muets dans leurs actions. Raphaël et les Carraches furent ses grands modèles : sur la fin de ses jours, il eut en vue le Guide et Louis Carrache. Naturellement gracieux et correct, le paysage, l’architecture, les ornements, les armures, les fleurs, furent les ouvrages de sa main ; chaque genre était touché dans le caractère qui lui était convenable ; les cheveux, les voiles, les feuilles, les plumes, étaient peints avec beaucoup d’esprit et d’intelligence.

Son école devint fameuse, et était remplie de bons élèves, parmi lesquels on peut distinguer Fellice Torelli, Cesare, Giuseppe Maroni, Giambatista Grati, Francesco Monti, etc.

Ses dessins sont assez rares en France ; il y en a au crayon rouge, d’autres sont à la plume d’une touche légère ; on y remarque le goût du Guide et des Carraches : souvent il faisait des grisailles peintes pour les tableaux qu’on lui demandait, et il les finissait beaucoup. Ses draperies sont un peu trop chargées de plis, et ses caractères de têtes se ressemblent presque tous ; c’est ce qui peut le distinguer des autres maîtres.
Il ne paraît aucun morceau gravé d’après lui ; mais il a fait, à l’eau-forte, d’après son maître Fasinelli, deux morceaux indiqués au commencement de cet éloge.



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