Gravure (de Léopold Massard) et texte extrait de l'ouvrage 'Costumes français depuis Clovis jusqu'à nos jours', publié par A. Mifliez en 1835 
           
         Jean Poton,  seigneur de Xaintrailles, l’un des guerriers les plus célèbres du temps de  Charles VII, et l’un de ceux qui ont le mieux justifié le surnom donné à ce  prince de roi bien servi, était un simple gentilhomme de Gascogne. Au  commencement de 1419 il était avec Pierre de Xaintrailles, dont il était sans  doute parent, dans le château de Louis; Pierre de Xaintrailles ayant été  surpris et égorgé par trahison, les gendarmes de la garnison n’eurent que le  temps de se retirer. « Lors, ils firent deux capitaines de deux gentilshommes,  Étienne de Vignoles  dit Lahire, et  Poton de Xaintrailles. »  
 Dès lors, il ne se passa guère aucun fait d’armes où ces deux  noms ne fussent mêlés. La même constance dans la  cause du Dauphin, la même activité, les mêmes ressources d’esprit signalèrent  Xaintrailles et La Hire. Au milieu du découragement général, lorsque le Dauphin  devenu roi n’était pour les Anglais que le roi de Bourges, lorsqu’il était  abandonné de tous les grands seigneurs, et s’abandonnait presque lui-même dans  sa propre insouciance, Xaintrailles et La Hire ne cessèrent pas un instant de  faire bonne et forte guerre aux anciens ennemis de la France et aux Bourguignons.  Ce fut ainsi que Xaintrailles acquit la renommée non seulement de bravoure,  mais de grande habilité dans le métier des armes.  
  Le comte Dammartin et les  autres capitaines de la génération suivante se glorifiaient d’avoir fait leurs  premières armes sous Xaintrailles et La Hire, et ils citaient avec complaisance  leurs mots, leurs préceptes, leurs ruses, leurs tours qu’ils jouaient aux  Anglais. Le nom de Xaintrailles n’était pas moins célèbre chez les ennemis,  et, à la bataille de Mons en Vimeu (1421), où le sire de Vilain sauva le duc de  Bourgogne et fit de si vaillants exploits, sa plus grande gloire fut d’avoir vu  reculer devant sa hache Xaintrailles qui fut fait prisonnier ce jour-là.  
  
  Dans  les rares moments de loisir que lui laissaient de telles guerres, il savait  aussi se faire honneur dans ses tournois. En 1423, il combattit dans une joute  solennelle avec Lionel de Vendôme, devant le duc de Bourgogne et le comte de  Richemont. Il fut de nouveau fait prisonnier à Crevant. Racheté à grand prix  par le roi, il fut choisi pour ambassadeur par les habitants d’Orléans, lors conditions  plus douces par l’intervention du duc de Bourgogne. La négociation échoua.   
  C’était le moment où tout semblait perdu pour le roi, et celui aussi où  apparut la Pucelle ; dès lors la fortune changea. Xaintrailles la seconda  devant Orléans, et à Patai, commanda l’avant-garde lorsqu’on entreprit le  voyage de Reims, et assista au sacre du roi. Peu après, il alla s’enfermer dans  Compiègne, pressé par les Anglais, en fit lever le siège, et ensuite remporta à  Germigni un avantage qui fut un des plus complets dans une guerre où l’on  donnait peu de grandes batailles.  
  Cependant les Anglais avaient fait périr la  Pucelle ; Xaintrailles, qui avait vu quelle confiance elle avait rendue aux  soldats, imagina de renouveler ce prodige. Il trouva un jeune berger qui avait  des visions, et qui montrait des stigmates sur les mains; il l’emmena, et  tâcha de le mettre en crédit. Guillaume-le-Pastourel ne produisit nul effet,  et la première fois qu’il le mena au combat, il fut fait prisonnier avec son  prophète.  
  Plus heureux en 1435, il gagna avec La Hire le combat de Gerberoi sur  le comte d’Arondel qui y fut tué. Il était avec le roi, lorsque ce prince  montra une valeur chevaleresque ; et à son entrée solennelle dans la ville de  Paris après vingt ans de guerre, Xaintrailles portait le casque du roi comme  grand écuyer de France.  
  Deux ans après, quand les efforts du roi et de ses  conseillers, pour mettre quelque bon ordre dans le royaume, eurent excité la  sédition de la Praguerie, Xaintrailles demeura fidèle au roi. En 1540, il contribua par sa valeur et son expérience à chasser les Anglais  de la Normandie et de la Guyenne. Tant de services ne restèrent pas sans récompense. II était  bailli de Berry, capitaine de la Tour de Bourges, de Falaise et de  Château-Thierry. Après la conquête de la Guyenne, il reçut la ville et la  seigneurie de Tonneins; puis on le fit sénéchal du Bordelais et du Limousin,  enfin maréchal de France en 1454.  
  Il survécut peu à Charles VII et  mourut à Bordeaux en 1461. Les registres du parlement, en faisant mention de sa  mort, l’appellent un des plus vaillants capitaines du royaume de  France, qui fut cause avec Etienne Fignoles dit La Hire, de chasser les  Anglais de France. 
  
   
 Son costume : Poton de Xaintrailles a  le casque et les mailles en or; son armure est en fer. Sa cuirasse est bleue  avec des ornements en or, et se termine par une étoffe de couleur laqueuse.  Son bouclier, son baudrier, ainsi que le harnais du cheval, sont rouges avec  des dessins en or. 
    |